mercredi 20 juin 2018

HÖLDERLIN / STIMME DES VOLKS / VOIX DU PEUPLE


 Friedrich HÖLDERLIN / STIMME DES VOLKS / VOIX DU PEUPLE

(traduction proposée par Patrick Guillot)

________________________________________________________ 

VOIX DU PEUPLE
                            (seconde version)
 
Tu es la voix du peuple, ainsi l’ai-je cru jadis
   Dans la jeunesse sacrée ; oui, et je le dis encore !
      À notre sagesse indifférents
         Rugissent pourtant aussi les fleuves, et néanmoins,

Qui ne les aime ? et toujours m’émeuvent-ils
   Le cœur, je les entends au loin, qui décroissant,
      Qui pleins de pressentiments, non par mon chemin
         Mais plus sûrement vers la mer se hâter.

Car s’oubliant lui-même, par trop disposé à combler
   Le souhait des Dieux, prend-il trop volontiers,
      Ce qui est mortel, quand les yeux grand ouverts
         Il suit une fois sa propre voie,

Pour revenir dans le Tout le plus court chemin ; ainsi se précipite
   Le fleuve vers le bas, il cherche le repos, l’emporte,
      L’attire contre sa volonté, de
         Rocher en rocher, ce désemparé,

La merveilleuse nostalgie pour l’abîme ;
   Le débridé excite, et des peuples aussi
      Épris de la volupté de la mort, et de fières
         Cités, après avoir recherché le meilleur,

D’année en année poursuivant l’œuvre, ont
   Trouvé une fin sacrée ; la terre verdoie
      Et calmement gît face aux étoiles,
           Tel qu’en prière, jeté dans le sable,

Volontairement abandonné, l’art dès longtemps
   Face à ces inimitables-là ; lui-même,
      L’homme, de sa propre main brise, pour
         Honorer les Très-Hauts, son œuvre, l’artiste.

Pourtant, ceux-là n’accordant pas moins leurs faveurs aux hommes,
   Ils aiment en retour comme ils sont ainsi aimés,
      Et souvent ralentissent, afin que longtemps dans
         La lumière il s’éjouisse, le chemin des hommes.

Et, non seulement les jeunes aigles, les jette
   Hors du nid le père, de peur qu’ils ne
      Demeurent trop longtemps près de lui, nous chasse aussi avec
         Le juste aiguillon en avant le Seigneur.    

Heureux sont-ils, ceux qui sont allés au repos
   Et tombés avant le temps, eux aussi, eux aussi
      Sacrifiés, tels que prémices
         À la moisson, ils ont trouvé leur part.

Sur le Xanthe s’étendait, au temps des Grecs, la cité,
   Mais à présent, telle que les plus grandes, qui là-bas se reposent,
      Est-elle, par un destin, de la lumière
         Sacrée du jour, retirée.

Ils périrent, non dans la mêlée ouverte,
   Mais de leurs propres mains. Terrifiante, de
      Ce qui advint là-bas, la merveilleuse
         Légende depuis l’Orient nous est parvenue.

Les excita la bonté de Brutus. Car,
   Comme s’éteignait l’incendie, s’offrit-il
      De les aider, bien qu’il sembla comme général
         Tenir le siège devant les portes.

Pourtant des remparts jetèrent-ils les messagers
   Qu’il envoyait. Plus vivace devint alors
      L’incendie, et ils se réjouirent, et leur
         Tendait la main Brutus

Et tous étaient hors d’eux. Une clameur
   S’éleva et un cri de joie. Alors dans la flamme se jettent
      Maris et femmes ; et des garçons se précipitent aussi
         Qui dans la mêlée, qui sur le glaive du père.

Il n’est pas conseillé de défier les héros. Dès longtemps
   Etait-ce pourtant préparé. Les pères aussi,
      Comme ils furent surpris, une fois, et
         Violemment par l’ennemi perse harcelés,

Embrasèrent, se saisissant des roseaux du fleuve
   Par lequel ils trouvèrent la liberté, la cité. Et maisons
      Et temples les prenait, vers l’Azur sacré
         S’envolant, et les hommes, la flamme.

Ainsi l’avaient entendu les enfants, et certes
   Sont bonnes les légendes, car une mémoire sont-
      Elles du Très-Haut, pourtant est-il aussi besoin
         De quelqu’un pour interpréter les sacrées.

 
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         STIMME DES VOLKS (Zweite Fassung)
                                        VOIX DU PEUPLE (seconde version)
 
Du seiest Gottes Stimme, so glaubt ich sonst
Tu es la voix du peuple, ainsi l’ai-je cru jadis
In heilger Jugend ; ja, und ich sag es noch !
   Dans la jeunesse sacrée ; oui, et je le dis encore !
Um unsre Weisheit unbekümmert
      À notre sagesse indifférents
Rauschen die Ströme doch auch, und dennoch,
         Rugissent pourtant aussi les fleuves, et néanmoins,

Wer liebt sie nicht ? und immer bewegen sie
Qui ne les aime ? et toujours m’émeuvent-ils
Das Herz mir, hör ich ferne die Schwindenden,
   Le cœur, je les entends au loin, qui décroissant,
Die Ahnungsvollen meine Bahn nicht,
   Qui pleins de pressentiments, non par mon chemin
Aber gewisser ins Meer hin eilen.
         Mais plus sûrement vers la mer se hâter.

Denn selbstvergessen, allzubereitet, den Wunsch
Car s’oubliant lui-même, par trop disposé à combler
Der Götter zu erfüllen, ergreift zu gern,
   Le souhait des Dieux, prend-il trop volontiers,
Was sterblich ist, wenn offnen Augs auf
      Ce qui est mortel, quand les yeux grand ouverts
Eigenen Pfaden es einmal wandelt,
         Il suit une fois sa propre voie,

Ins All zurück die kürzeste Bahn ; so stürzt
Pour revenir dans le Tout le plus court chemin ; ainsi se précipite
Der Strom hinab, er suchet die Ruh, es reißt,
   Le fleuve vers le bas, il cherche le repos, l’emporte,
Es ziehet wider Willen ihn, von
      L’attire contre sa volonté, de
Klippe zu Klippe, den Steuerlosen,
         Rocher en rocher, ce désemparé,

Das wunderbare Sehnen dem Abgrund zu ;
La merveilleuse nostalgie pour l’abîme ;
Das Ungebunde reizet und Völker auch
   Le débridé excite, et des peuples aussi
Ergreift die Todeslust und kühne
      Épris de la volupté de la mort, et de fières
Städte, nachdem sie versucht das Beste,
         Cités, après avoir recherché le meilleur,

Von Jahr zu Jahr forttreibend das Werk, sie hat
D’année en année poursuivant l’œuvre, ont
Ein heilig Ende troffen ; die Erde grünt
   Trouvé une fin sacrée ; la terre verdoie
Und stille vor den Sternen liegt, den
      Et calmement gît face aux étoiles,
Betenden gleich, in den Sand geworfen,
           Tel qu’en prière, jeté dans le sable,

Freiwillig überwunden die lange Kunst
Volontairement abandonné, l’art dès longtemps
Vor jenen Unnachahmbaren da ; er selbst,
   Face à ces inimitables-là ; lui-même,
Der Mensch, mit eigner Hand zerbrach, die
      L’homme, de sa propre main brise, pour
Hohen zu ehren, sein Werk, der Künstler.
         Honorer les Très-Hauts, son œuvre, l’artiste.

Doch minder nicht sind jene den Menschen hold,
Pourtant, ceux-là n’accordant pas moins leurs faveurs aux hommes,
Sie lieben wieder, so wie geliebt sie sind,
   Ils aiment en retour comme ils sont ainsi aimés,
Und hemmen öfters, daß er lang im
      Et souvent ralentissent, afin que longtemps dans
Lichte sich freue, die Bahn des Menschen.
         La lumière il s’éjouisse, le chemin des hommes.

Und, nicht des Adlers Jungen allein, sie wirft
Et, non seulement les jeunes aigles, les jette
 Der Vater aus dem Neste, damit sie nicht
   Hors du nid le père, de peur qu’ils ne
Zu lang ihm bleiben, uns auch treibt mit
     Demeurent trop longtemps près de lui, nous chasse aussi avec
Richtigem Stachel hinaus der Herrscher.
         Le juste aiguillon en avant le Seigneur.

Wohl jenen, die zur Ruhe gegangen sind,
Heureux sont-ils, ceux qui sont allés au repos
Und vor der Zeit gefallen, auch die, auch die
   Et tombés avant le temps, eux aussi, eux aussi
Geopfert, gleich den Erstlingen der
      Sacrifiés, tels que prémices
Ernte, sie haben ein Teil gefunden.
         À la moisson, ils ont trouvé leur part.

Am Xanthos lag, in griechischer Zeit, die Stadt,
Sur le Xanthe s’étendait, au temps des Grecs, la cité,
Jetzt aber, gleich den größeren, die dort ruhn,
   Mais à présent, telle que les plus grandes, qui là-bas se reposent,
Ist durch ein Schicksal sie dem heilgen
      Est-elle, par un destin, de la lumière
Lichte des Tages hinweggekomen.
         Sacrée du jour, retirée.

Sie kamen aber, nicht in der offnen Schlacht,
Ils périrent, non dans la mêlée ouverte,
Durch eigne Hand um. Fürchterlich ist davon,
   Mais de leurs propres mains. Terrifiante, de
Was dort geschehn, die wunderbare
      Ce qui advint là-bas, la merveilleuse
Sage von Osten zu uns gelanget.
         Légende depuis l’Orient nous est parvenue.

Es reizte sie die Güte von Brutus. Denn
Les excita la bonté de Brutus. Car,
Als Feuer ausgegangen, so bot er sich,
   Comme s’éteignait l’incendie, s’offrit-il
Zu helfen ihnen, ob er gleich, als Feldherr,
      De les aider, bien qu’il sembla comme général
Stand in Belagerung vor den Toren.
         Tenir le siège devant les portes.

Doch von den Mauern warfen die Diener sie,
Pourtant des remparts jetèrent-ils les messagers
Die er gesandt. Lebendiger ward darauf
   Qu’il envoyait. Plus vivace devint alors
Das Feuer und sie freuten sich und ihnen
      L’incendie, et ils se réjouirent, et leur
Strecket’ entgegen die Hände Brutus
         Tendait la main Brutus

Und alle waren außer sich selbst. Geschrei
Et tous étaient hors d’eux. Une clameur
Entstand und Jauchzen. Drauf in die Flamme warf
   S’éleva et un cri de joie. Alors dans la flamme se jettent
Sich Mann und Weib, von Knaben stürzt’ auch
      Maris et femmes ; et des garçons se précipitent aussi
Der von dem Dach, in der Väter Schwert der.
         Qui dans la mêlée, qui sur le glaive du père.

Nicht rätlich ist es, Helden zu trotzen. Längst
Il n’est pas conseillé de défier les héros. Dès longtemps
Wars aber vorbereitet. Die Väter auch,
   Etait-ce pourtant préparé. Les pères aussi,
Da sie ergriffen waren, einst, und
      Comme ils furent surpris, une fois, et
Heftig die persischen Feinde drängten,
         Violemment par l’ennemi perse harcelés,

Entzündeten, ergreifend des Stromes Rohr,
Embrasèrent, se saisissant des roseaux du fleuve
Daß sie das Freie fänden, die Stadt. Und Haus
   Par lequel ils trouvèrent la liberté, la cité. Et maisons
Und Tempel nahm, zum heilgen Aether
      Et temples les prenait, vers l’Azur sacré
Fliegend, und Menschen hinweg die Flamme.
         S’envolant, et les hommes, la flamme.

So hatten es die Kinder gehört, und wohl
Ainsi l’avaient entendu les enfants, et certes
Sind gut die Sagen, denn ein Gedächtnis sind
   Sont bonnes les légendes, car une mémoire sont-
Dem Höchsten sie, doch auch bedarf es
      Elles du Très-Haut, pourtant est-il aussi besoin
Eines, die heiligen auszulegen.
         De quelqu’un pour interpréter les sacrées.
 

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             STIMME DES VOLKS         (zweite Fassung)
Du seiest Gottes Stimme, so glaubt ich sonst
In heilger Jugend ; ja, und ich sag es noch!
Um unsre Weisheit unbekümmert
Rauschen die Ströme doch auch, und dennoch,

Wer liebt sie nicht ? und immer bewegen sie
Das Herz mir, hör ich ferne die Schwindenden,
Die Ahnungsvollen meine Bahn nicht,
Aber gewisser ins Meer hin eilen.

Denn selbstvergessen, allzubereitet, den Wunsch
Der Götter zu erfüllen, ergreift zu gern,
Was sterblich ist, wenn offnen Augs auf
Eigenen Pfaden es einmal wandelt,

Ins All zurück die kürzeste Bahn ; so stürzt
Der Strom hinab, er suchet die Ruh, es reißt,
Es ziehet wider Willen ihn, von
Klippe zu Klippe, den Steuerlosen,

Das wunderbare Sehnen dem Abgrund zu ;
Das Ungebunde reizet und Völker auch
Ergreift die Todeslust und kühne
Städte, nachdem sie versucht das Beste,

Von Jahr zu Jahr forttreibend das Werk, sie hat
Ein heilig Ende troffen ; die Erde grünt
Und stille vor den Sternen liegt, den
Betenden gleich, in den Sand geworfen,

Freiwillig überwunden die lange Kunst
Vor jenen Unnachahmbaren da ; er selbst,
Der Mensch, mit eigner Hand zerbrach, die
Hohen zu ehren, sein Werk, der Künstler.

Doch minder nicht sind jene den Menschen hold,
Sie lieben wieder, so wie geliebt sie sind,
Und hemmen öfters, daß er lang im
Lichte sich freue, die Bahn des Menschen.

Und, nicht des Adlers Jungen allein, sie wirft
Der Vater aus dem Neste, damit sie nicht
Zu lang ihm bleiben, uns auch treibt mit
Richtigem Stachel hinaus der Herrscher.

Wohl jenen, die zur Ruhe gegangen sind,
Und vor der Zeit gefallen, auch die, auch die
Geopfert, gleich den Erstlingen der
Ernte, sie haben ein Teil gefunden.

Am Xanthos lag, in griechischer Zeit, die Stadt,
Jetzt aber, gleich den größeren, die dort ruhn,
Ist durch ein Schicksal sie dem heilgen
Lichte des Tages hinweggekomen.

Sie kamen aber, nicht in der offnen Schlacht,
Durch eigne Hand um. Fürchterlich ist davon,
Was dort geschehn, die wunderbare
Sage von Osten zu uns gelanget.

Es reizte sie die Güte von Brutus. Denn
Als Feuer ausgegangen, so bot er sich,
Zu helfen ihnen, ob er gleich, als Feldherr,
Stand in Belagerung vor den Toren.

Doch von den Mauern warfen die Diener sie,
Die er gesandt. Lebendiger ward darauf
Das Feuer und sie freuten sich und ihnen
Strecket’ entgegen die Hände Brutus

Und alle waren außer sich selbst. Geschrei
Entstand und Jauchzen. Drauf in die Flamme warf
Sich Mann und Weib, von Knaben stürzt’ auch
Der von dem Dach, in der Väter Schwert der.

Nicht rätlich ist es, Helden zu trotzen. Längst
Wars aber vorbereitet. Die Väter auch,
Da sie ergriffen waren, einst, und
Heftig die persischen Feinde drängten,

Entzündeten, ergreifend des Stromes Rohr,
Daß sie das Freie fänden, die Stadt. Und Haus
Und Tempel nahm, zum heilgen Aether
Fliegend, und Menschen hinweg die Flamme.

So hatten es die Kinder gehört, und wohl
Sind gut die Sagen, denn ein Gedächtnis sind
Dem Höchsten sie, doch auch bedarf es
Eines, die heiligen auszulegen. 

 


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