LE DÉJEUNER SUR L'HERBE (MANET–PICASSO)
Francis Esquier
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Francis Esquier est agrégé et docteur de l’Université. Il est
aussi épris de peinture, de sculpture, d’architecture et se sent
particulièrement interpelé par l’œuvre de Picasso, œuvre dont les
manifestations posthumes paraissent inépuisables.
Entre octobre 2008 et février 2009, le Musée d’Orsay exposa
la majeure partie des nombreux dessins, peintures, etc., que Picasso avait
réalisés en tractation, si l’on peut dire, avec l’un des chefs-d’œuvre
d’Edouard Manet, le Déjeuner sur l’herbe. Le catalogue de
cette exposition existe encore et peut être consulté.
Pourquoi cette entreprise de la part du maître octogénaire ?
N’avait-il pas déjà affronté tant de fois le nu féminin, et de manières si
souvent renouvelées ? Avait-il pour but de s’inscrire plus à fond dans une
tradition immémoriale de la sculpture et de la peinture, tradition attachée au
thème, majeur entre tous, de la figuration de la nudité, comme il en va de la
représentation de l’amour en littérature ?
Et pourquoi choisir Manet plutôt que Ingres ou Courbet entre autres ? – Peut-être parce que Manet, lui-même conscient de cette tradition, avait cru pouvoir révéler du nu (féminin) un aspect inédit, plus vrai, plus authentique. Peut-être le défi à relever et l’enjeu se trouvaient-ils là. Manet avait-il prononcé le mot définitif, le dernier mot de la modernité au sujet du nu féminin en peinture ?
Quand on tient compte de l’enjeu et du défi majeurs que
constitue la représentation du nu pour un peintre, peut-être peut-on comprendre
aussi que, dès 1932, Picasso en ait anticipé les difficultés et les tourments :
“quand je vois le déjeuner sur l’herbe de Manet je me
dis des douleurs pour plus tard.”
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Cette étude se présente ici en dix chapitres,
répartis sur ces 6 pages :
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