‘Retour au 5, rue de la
Folie-Dencourt’
De toute façon, on peut
supposer, raisonnablement, que l'on ne pourrait le descendre qu'après l'avoir
monté une fois.
…
De mon côté, j'ai
rêvassé sur ce que cet escalier-là, sur cette image-ci, pouvait m'évoquer d'une
époque ancienne, disons même "Ancien Régime", et, partant de là... du
théâtre de Marivaux, par exemple ?
Et, de fil en aiguille,
et de scènes en intrigues, j'ai à la fin été pris dans l'idée des réminiscences
proustiennes, au travers desquelles on recherche le temps dont on a perdu le
sens, avant de nous y retrouver par tous nos sens.
…
Ici, ce pourrait être,
entre autres histoires possibles, celle d'un personnage qui retourne en une
certaine maison où, il y a bien des années, il a vécu...
Au pied de cet escalier,
il n'est plus l'heure pour lui de se demander s'il va pouvoir le monter, ou d’espérer
que l'on vienne l'y rejoindre...
Remémoration sensorielle ? Est-ce ici une certaine odeur, sèche,
de poussière accumulée ? Est-ce une certaine pénombre, seulement
contredite par une minuterie parcimonieuse et, au palier au dessus, par cette
étroite fenêtre ?
Au pied de cet escalier, cela a été le « point d’un départ »,
qu’alors il ne pouvait penser définitif.
…
*
Le titre cite une rue,
"de la Folie-Dencourt", qui est sans rapport avec aucune rue
existante... Mais, je me souviens d’un
autre aspect marquant de l'œuvre de Proust qui se trouve résumé en ces deux
titres de chapitres : ‘Nom de Pays : le
Nom’ et ‘Nom de Pays : le Pays’.
(D'un pays nous nous
faisons d’abord une idée selon ce que son nom nous évoque, puis une tout autre
idée quand nous découvrons le pays lui-même. Cette mécanique, très généralement
déceptive, joue aussi pour certains personnages, aperçus tout d'abord selon la
réputation attachée à leurs noms, hors de toute considération pour leur réalité
propre. Etc.
Donc, comme par un
processus inverse, je peux aller d’un « pays » - fictif -, à un « nom »
- le titre d’une œuvre.
Les titres, donnés aux
œuvres, et par lesquels, dans la quasi totalité des cas, le public les reçoit
"au premier abord", ils peuvent bien être tout à fait quelconques ;
cette banalité aura son effet particulier. Si je découvre un tableau dont le
titre affiché est 'Sans titre', ou bien réduit à une date, comme cela se
trouve, je suis tout autant pré-conditionné dans mon regard sur lui que - par
exemple - devant une œuvre de Paul Klee intitulée 'Wunderbar Landing', ou avant d'écouter une pièce d’Erik Satie
désignée comme 'Choses vues à gauche et à
droite' pour piano et violon.)
*
La musique, née d’une
image fixe, est ici, encore une fois, elle-même, source d’autres images,
animées.
Leur montage particulier a été conditionné par la musique, préalablement fixée.
Le seul de ses
caractères qui soit moins traditionnel est sa mesure, à 5 temps.
Et tout ce morceau était
'programmé' comme un mouvement (miniature) de concerto (pour clavecin et
ensemble de cordes), avec la 'cadence' du soliste qui s'impose, etc.
Les cordes, sur le
format que je m'étais fixé (6 minutes), n'étaient pas destinées à jouer d'autre
rôle que celui d'une "basse continue" un peu... enveloppée, si je
peux dire.
La partie de clavecin
est jouée sur une modélisation (*) d'une copie réalisée par Matthias Griewisch
(**), d’un instrument signé en 1624 par Hans Ruckers II le Jeune, également
connu sous le nom de Joannes Ruckers, l’un des deux fils de Hans Ruckers.
(*)
https://www.modartt.com/harpsichord
(**) http://www.griewisch.com/franzoesisch/instrumente/flaemische/ruckers1624.php