METAMORPHOSE
Le passage ayant été compris comme déplacement – d’un
point à un autre, de quelqu’un, ou de quelque chose, par quelqu’un ou quelque
chose –, on me dit qu’il peut être compris en un autre sens, celui de transformation : passage d’une
forme, ou d’un état, à l’autre.
Mais
cela revient encore à un déplacement, celui d’un ou plusieurs des éléments de
l’objet de la transformation. (Tel élément, qui était ici, est maintenant placé
là, ou ailleurs, et celui qui était là est déplacé jusqu’ici, ou ailleurs, et
cela, qui a été rapporté d’ailleurs, a pris la place de ceci, qui a été laissé
ailleurs, etc.)
Ainsi
est opéré toute métamorphose, uniquement par l’effet de déplacements, de
passages, et sans besoin d’aucune création à partir de rien.
Et si
je dis : J’ai passé un moment
(comme ci ou comme ça) ?
Bien
entendu, si je l’ai passé, ce
moment-là, ce n’est pas en l’ayant, lui, déplacé d’un point à un autre de la
succession des moments, non plus qu’en ayant changé sa forme ! Ce n’est
pas ce moment qui est l’objet du passage (du déplacement, de la métamorphose),
mais moi-même, qui l’a traversé ;
c’est moi qui me suis déplacé du point D de son début au point F de sa fin.
On doit
dire que l’on a passé un moment comme on dit que… l’on aura passé la porte,
ou bien comme on chante qu’il suffit de passer le pont...
Quand
bien même on persiste à dire (par commodité métaphysique ou linguistique) qu’il
passe, en sous entendant ainsi qu’il a un commencement et une fin, le temps, ni
long ni court, ni vite ni lentement ne se transforme, ni ne se déplace.
Et
quand bien même on voudra lui voir un commencement et une fin, on le trouvera,
en tous points de son prétendu passage de l’un à l’autre, égal, absolument.
Le
temps ne passe pas.
Mais,
les arbres poussent.
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