Une mémoire habitable ?
Dans la lettre de cet ami, reçue hier, il aura suffi d'une brève évocation
de certaines choses passées pour provoquer, ce matin, entre sommeil et réveil,
une espèce de "vision" - de celles qui se forment en nous sans que
notre délibération y soit pour quelque chose.
Une maison alors tout particulièrement individuelle - à
chaque fois avec son dessin unique, ses agencements pour chacune à nulle autre
pareille.
C'est que chacune de ces maisons était le produit de l'existence propre à
chacun d'entre nous, ou du moins comme son relevé topographique en quelque
sorte - en trois dimensions, et même plus.
Une simple figuration de la
mémoire ?
Sans doute. Mais ce serait alors au travers d'une figure bien solide, et
disposant d'une emprise sensible sur l'espace, et de dimensions suffisantes
pour nous tenir rassemblés, et abrités des intempéries, etc.
Rien à voir avec l'évanescence des souvenirs ?
Une personne humaine, une maison.
Avec, et pour quelques unes seulement, pour seule trace, peut être une
vieille photo perdue entre les pages desséchées d'un vieil album, oublié au
fond d'une cave... d'une autre maison ?
Admettons aussi qu'il soit possible, en quelques maisons exceptionnelles,
que certaines de leurs pièces restent encore, pour un temps, ouvertes à la
visite - sous la forme d'une salle de musée, où d'un livre sur l'étagère d'une
bibliothèque ?
Et, la plupart du temps, n'y pénètrent que les personnes que nous y
invitons - pour autant qu'elles puissent s'y retrouver...
Des pièces peuvent être restées longtemps fermées, encombrées d'un désordre
qui semble inextricable quand, par curiosité ou par inadvertance, nous en entrouvrons
un instant la porte - que nous refermons aussi vite !
Mais, refuser de considérer ce désordre n'effacera pas son existence...
D'autres pièces sont restées à peu près comme elles étaient, nous semble-t-il, quand nous les avions refermées, il y a si longtemps, pour la dernière fois...
Sans doute la poussière accumulée en dissimule certains détails. Mais
voilà, un peu de ménage, et on ouvre les volets ! Et tout se retrouve propre et
vif sous le soleil neuf...
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