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mercredi 19 octobre 2016

CHASSE À L’ÉLAN

mercredi 19 octobre 2016,

J’ai commencé ma journée à l’atelier en ouvrant le volume ‘Poésie’ de Raymond Carver, publié par les Éditions de l’Olivier. C’est un geste que je fais assez souvent : ce volume est toujours là en évidence, à portée de main, pour que j’en lise une – ou plusieurs pages, à la première envie, sans avoir besoin de l’extraire d’un rayon de la bibliothèque.
Ce matin, pages 103 et 104, c’est ‘CHASSE À L’ÉLAN’.

Je ne sais rien de l’effet sur des lecteurs anglophones, de ces textes tels qu’ils ont été écrits en anglais (des États-Unis). Mais il me suffit qu’ils me percutent, moi, dans une de leurs versions françaises. Ce matin, donc, cette traduction-là, de Jacqueline Huet et Jean-Pierre Carasso, d’un poème extrait de ‘Où l’eau s’unit avec l’eau’.





Si je parle ici de ce poème, ce n’est pas pour en « dire » quoi que ce soit. Tout d’abord parce que je suppose qu’il en existe par ailleurs assez de gloses pertinentes, pour que j’éprouve le besoin d’y rajouter la mienne.
Ensuite… c’est un poème. C’est-à-dire : il suffit de le lire.
Il ne faut que s’ouvrir à ce qu’il dit, comme il le dit, simplement. Mais, de le lire en s’ouvrant à tout ce qu’il dit, en ne pensant à rien d’autre qu’à ce qu’il dit – tel quel, comme il le dit.
(Peut-être que, de pouvoir ainsi pratiquer la lecture, ce n’est pas si évident ? Peut-être. Mais, chacun pour soi !)
Je ne parlerai donc pas de ce poème (de sa réalité textuelle) ; mais je pourrais parler de la réalité de ma lecture ? La lecture – c’est-à-dire chaque lecture effective, pratique, « concrète », si l’on peut dire – c’est la seule façon possible pour que soit révélé l’être d’un texte, si je peux le dire ainsi … Mais, ce que je reçois, moi, dans ma lecture, ça n’intéresse vraiment que moi. Par contre, « ma lecture », ce matin, m’a reconduit à cet échange, dont nous sortons, provoqué par l’attribution du prix Nobel de Littérature à Bob Dylan.
La question n’étant pas, cela est dit, celle de l’évaluation de la grandeur du talent, ou même du génie, de Dylan, mais uniquement, évidemment – pour savoir si c’est un prix « de Littérature » que méritait ce lauréat-là –,  dans un « Mais, qu’est-ce que c’est donc, que la Littérature ? » …

*

Et, lisant ce poème de Raymond Carver ce matin, c’était une double illumination.
D’abord, ce que disait ces mots-là, j’en éprouvais tous les sens possibles, je crois – et il suffit ici que j’y crois pour que cela constitue toute la réalité  de ce moment-là. (Tous les sens possibles : les propres et les figurés, les explicites et les sous entendus… et la façon dont tous ces mots, dans leur choix et leur disposition rythmique, me faisant découvrir une autre existence, ailleurs, en un autre temps, réactivaient nos expériences communes, de toutes nos existences humaines…)
Et puis que, là, je faisais l’épreuve de ce qu’est la Littérature.


Pas de musique. Pas même le souvenir du grain d’une voix étrangère. Juste une élocution muette, par devers moi. Et c’est tout.

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